• Une question

    Comment agir quand on est convaincu de la vanité de tout combat ? Ce qui rend toute lutte absurde est la certitude qu'au bout c'est la mort, la suprême annulation de tout. Si j'oublie l'égoïsme de cette évidence tragique, il est un autre argument qui affaiblit l'envie de se battre, c'est la multitude des motifs et des adversaires, leur épaisseur inerte. Les masses crédules obéissent aux injonctions médiatisées des puissants, les seuls qui tirent parti d'un système aberrant. Attristant constat qui s'applique à diverses échelles, du monde professionnel, à celle de la nation, en passant par bien d'autres contextes. À titre personnel, des occasions de combattre des injustices subies m'ont été données par l'intermédiaire de vicieux au cœur sec. J'ai souffert, j'ai résisté, j'ai connu dans mes malheurs la chance de pouvoir prendre appui, pour pouvoir m'extraire du marasme causé, sur des collègues charitables, incarnant les vertus de l'amitié. On a voulu me pousser vers la sortie de l'établissement où j'enseignais, paradoxalement dédié à la Vierge et à la Paix, voire vers le suicide. Malgré les pressions, je suis resté, subissant d'autres vexations, d'autres mises à l'écart. Heureusement soutenu par le plaisir de l'enseignement, par les bonnes relations avec les étudiants, par la lecture et le jardinage, j'ai pu passer presque tranquillement mes dernières années d'activité professionnelle, gâtées cependant par les mesures hygiénistes absurdes imposées par des gouvernants aussi dépassés que sadiques.

    Aujourd'hui les malfaisants continuent à parader, forts de leur incompétence, de leur narcissisme et de leur vice. Ils font s'écrouler l'institution scolaire dont ils sont responsables, comme d'autres le pays, sans que les autorités supérieures, pourtant dûment prévenues, n'interviennent. Mes avertissements n'auront donc servi qu'à me mettre en danger, la plupart de mes collègues ayant cédé à l'indifférence, à la lâcheté, à la soumission intéressée. Et je n'oublie pas « l'ami », appelé à l'aide lors de ma noyade provoquée, intervenu non pour me sauver, mais pour me maintenir la tête sous l'eau.

    Bilan, que l'on peut étendre : les salauds, avec toutes les nuances que ce vocable indélicat peut contenir, qu'ils soient puissants ou non, sont nombreux, les êtres bons sont rares et précieux.

    L'action est vaine quand elle n'est pas soutenue par ceux-là mêmes qui, subissant l'autorité incompétente et injuste, ne feront rien pour exprimer leur désapprobation, ou, pire, se feront les alliés plus ou moins actifs des détenteurs d'un pouvoir immérité. L'égoïsme et la pleutrerie étant choses au monde largement partagées. Mais heureusement, aussi peu nombreux soient-ils, la présence de vrais amis permet de se relever. Fallait-il lutter, peut-on se demander une fois le combat perdu ? Bien entendu !